L’invisibilité des directeurs artistiques

10 avril 2016

La rencontre de vendredi dernier avec l’auteure Élise Turcotte et l’artiste Daniel Sylvestre m’a révélé, entre autres choses vraiment intéressantes (il fallait y être !), qu’ils ne sont pas les seuls artisans de Rose derrière le rideau de la folie, leur scrapbook-poésie pour lequel ils ont reçu chacun un prix du Gouverneur-général.

Je ne pense pas ici à l’éditeur, ceci dit sans enlever à la courte échelle le mérite qui lui revient : cela coute cher un livre comme celui-là, et la confiance et la liberté accordées à Élise et Daniel par Hélène Derome est à souligner. Je parle ici du directeur artistique Jean-François Lejeune, qui a fait de chaque page un tableau. À peine si on parvient à lire son nom dans la page des crédits, en lettres minuscules, imprimées ton sur ton! Il est totalement agent du communiqué de presse! De toute évidence, ce quatrième joueur a contribué pour une bonne part au produit. Dans quel pourcentage? Je répondrais 25%. Aurait-il mérité de partager un prix avec Élise, Daniel et la courte échelle? Sinon, à tout le moins, de voir son nom en couverture?

Je vous raconte, pour la comparaison… À une époque, j’ai co-écrit avec un avocat des guides de vulgarisation juridique. Peu après, un éditeur de livres de droit a reçu le manuscrit d’un ouvrage sur le droit des biens destiné aux futurs avocats. Il a jugé que les deux auteurs de ce manuscrit, les avocats et professeurs de droit Jean Goulet et Ann Robinson, bénéficieraient de mon expertise (j’ai un Ph. D. en technologie éducationnelle) et, avec leur accord, il m’a donné un contrat de réorganisation du contenu. À la fin du processus, les deux profs ont évalué ma contribution à ce point importante, qu’ils ont demandé à l’éditeur d’ajouter nom nom au même titre que les leurs, comme auteure donc.

Je ne critique ni la courte échelle, ni Élise, ni Daniel – ils ont reconnu lors de l’entrevue la contribution exceptionnelle de Jean-François Lejeune.  Je sais que c’est généralement ainsi que l’on fait dans le milieu, je dis seulement que l’invisibilité du directeur artistique, ou d’ailleurs littéraire, ne me semble pas juste dans certains cas. On a appris à reconnaitre les droits des photographes et des traducteurs littéraires… et les artistes infographistes alors?